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—-Av, le mois ‘’père ’’—–

—Un pas vers l’amour inconditionnel—-

—-Réduire les activités——-

 

—-Av, le mois ‘’père ’’—–
Il y a un an et demi, les titres des journaux du monde entier ont rapporté la mort tragique de David Cohen et de sa femme, de mémoire bénie, dans un accident de voiture. Plusieurs autres membres de la famille ont également trouvé la mort dans ce drame.

Un an et demi plus tard, son gendre, Michael Lévy, laissa ses affaires de côté et se rendit à Jérusalem afin d’y étudier la Torah. Il a rejoint son frère, un érudit en Torah, étudiant dans la plus grande yéchiva du monde, la yéshivat Mir. Après une semaine d’étude intensive aux côtés d’érudits du Talmud de haut niveau, on a demandé à Michael de partager ses pensées avec le groupe, concernant la période de deuil observée par le peuple juif, connue sous le nom des “trois semaines “, ainsi que son ressenti concernant  son beau-père défunt, David Cohen. Ses paroles émurent le groupe d’érudits aux larmes.

Entre autres, il a développé l’idée que le mois de av, est le seul mois dans le calendrier juif, dont le nom a une signification dans la langue hébraïque. Av signifie père. Pourquoi, a-t-il demandé, c’est précisément le mois de av, pendant lequel nous commémorons la destruction de Jérusalem et du Temple qui est appelé « père » ?

Avant de répondre à cette question, Michael évoqua sa tragédie familiale, et la façon dont les membres de sa famille tentent de faire face à cette énorme perte.

Il est évident que rien ne pourra combler le terrible vide, et que seule la foi est salvatrice dans ce genre de situations.

Tout au long de l’histoire juive, notre nation a subi de nombreuses pertes pendant la période entre les deux jeûnes qui marque le début et la fin des «trois semaines ». Et nous continuons à pleurer pour chaque perte. Comme Michael Lévy, nous pourrions être tentés de rechercher des réponses précises, ou une explication à chaque tragédie, que ce soit sur le plan personnel ou national. Nous recherchons quelqu’un vers qui crier, ne sachant pas comment faire face à nos difficultés. Mais en réalité, il n’existe qu’une seule réponse à toutes nos questions : אב / père. Nous avons un Père dans le Ciel ; Lui seul peut nous soutenir, et plus encore, ne demande qu’à le faire. Il nous demande de réaliser que nous n’avons pas une série de problèmes individuels, mais plutôt un seul problème sérieux: la distance qui nous sépare de Lui. Ceci devrait être notre objectif principal pendant ces journées difficiles: réaliser que notre relation avec notre Père céleste n’est pas ce qu’elle devrait être, et faire tout ce qui est en notre pouvoir afin de renforcer ce lien unique.

L’amour d’un père

La relation entre un père et son enfant est différente de celle d’une mère et son enfant. La relation unissant la mère à son enfant, abonde d’expressions et de marques d’amour. Le père, par contre, établit une relation avec son enfant, à travers laquelle l’amour est souvent voilé. En effet, un père est sans arrêt occupé à l’extérieur, et de ce fait, les marques d’amour ou d’affection envers ses enfants sont souvent limitées. Mais si quelque chose devait arriver à l’enfant,  à D.ieu ne plaise, l’amour profond du père ressortirait et s’exprimerait dans toute sa force ; il serait prêt d’ailleurs à faires d’énormes sacrifices pour le bien de son enfant.

Il existe une autre différence souvent rencontrée dans la relation que l’enfant entretient avec sa mère, et son père. Un enfant se gardera plus souvent de faire part à son père de son embarras. Il demandera tout naturellement à sa mère de ne pas raconter ses transgressions à son père. Par contre, il ne demandera pas à son père de s’abstenir de raconter ses mauvais comportements à sa mère. L’enfant est convaincu que sa mère l’acceptera quoiqu’il arrive, mais son père est attaché à certains critères et principes desquels il ne déroge pas si facilement. Lorsque le père désapprouve le comportement de son enfant, ce dernier est amené à améliorer sa conduite. Notre relation envers D.ieu, de surcroît, pendant ce mois de av, est similaire à cette relation père/enfant.

Alors que nous approchons du jour terrible de ticha bé av, nous devons nous rappeler que notre douleur émotionnelle, à la fois au niveau national et personnel, n’est pas le moins du monde comparable à celle de notre Père céleste. Un père ne peut être père uniquement dans la mesure où il a un enfant. Sans nous, D.ieu ne peut être un Père. Notre comportement face à cette prise de conscience fera toute la différence. Il est évident que nous devons pleurer pendant ces trois semaines sur nos souffrances personnelles. Un niveau supérieur consiste à pleurer sur les tragédies qui ont frappé l’ensemble de notre peuple tout au long de l’histoire. Mais le plus haut niveau réside dans le fait de pleurer sur les souffrances et la douleur que nous avons causées à notre Père céleste par nos fautes.

Puissent nos larmes sincères se joindre aux larmes de tous les Juifs plongés dans la douleur qui crient : «Papa ! En ce jour de ticha bé av, puisses-Tu nous réjouir et nous réunir dans la ville sainte de Jérusalem reconstruite. Amen ».

 

 

—-Un pas vers l’amour inconditionnel—-

Nos Sages nous enseignent que la raison de la destruction du Second Temple et la dispersion de notre peuple parmi les nations a été la שנאת חנם – la haine gratuite. Seule la אהבת חינם – l’amour inconditionnel – engendrera la reconstruction du Temple et la fin de notre exil amer.

Je connais quelqu’un qui a décidé de faire un effort particulier pour essayer de ressentir cet ‘’amour inconditionnel’’. Quand il se trouve dans une pièce, il se demande : «Comment pourrais-je développer en moi la faculté d’aimer et de respecter chaque juif présent dans cette salle ? » Bien que cette approche soit certainement louable, je ne pense pas qu’elle constitue la solution à notre problème, car elle est limitée. La plupart des gens présents dans la salle ne seraient pas conscients de ce que cet individu pense. Par contre, si cette approche était légèrement modifiée, je pense qu’elle pourrait créer une véritable révolution, de surcroît, pendant cette période particulière des « trois semaines ». La question que nous devrions nous poser est : « Comment faire pour que les gens qui sont autour de moi ressentent que je les aime et les respecte ? »
Nous avons tendance à penser que la meilleure façon de prouver aux gens que nous les aimons est de leur offrir des cadeaux ou de leur accorder des faveurs. Mais la vérité est toute autre. Comme un grand sage nous l’a enseigné : « Un homme est beaucoup plus touché et sensibilisé par le ressentiment que son prochain lui procure que par ses faveurs. » Comment pouvons-nous nous comporter afin que ceux qui nous entourent se sentent bien ? En éprouvant un véritable intérêt à ce qu’ils font, et en leur souriant. Nos Sages ont compris ce principe à travers un enseignement de la Torah “ולבן שיניים מחלב”, ce qui signifie : Il est préférable de montrer les dents blanches d’un sourire sincère que de servir un verre de lait. (כתובות קיא:).

Nous avons tendance à penser que nous faisons preuve d’une amabilité particulière en souriant à quelqu’un, mais la vérité est que nous pouvons réellement gâcher la journée de quelqu’un en le saluant, sans lui sourire. Dans cet ordre d’idées, nos Sages nous enseignent que c’est notre responsabilité de ne jamais accueillir quelqu’un avec un visage acerbe. C’est d’une certaine façon ‘’injuste ’’ pour la personne en face de nous. Plus loin, nos Sages nous apportent un enseignement encore plus étonnant : Il est dit d’une personne qui offre de somptueux cadeaux en affichant un visage désagréable, que c’est comme si elle ne donnait rien. Par contre, si elle accepte l’autre et lui sourit sincèrement, c’est comme si elle lui offrait tous les cadeaux du monde, même si elle n’offre rien concrètement. “(Avot de R’ Nathan, fin du ch.13).

L’explication en est simple : en souriant à quelqu’un, on lui prouve la valeur qu’il a à nos yeux. Il n’y a pas de plus grande marque de considération que de se soucier réellement de quelqu’un. Et c’est au fond ce que le monde actuel recherche. Un cadeau est seulement un “signe de reconnaissance’’ mais un sourire représente l’appréciation même.

Un matin, alors que j’étais en chemin pour aller prier, une femme faisant son jogging avec son chien m’a dépassé. Je ne pouvais pas m’empêcher de remarquer ce qui était écrit sur son T-shirt : “Personne ne me comprend, sauf mon chien ! ” Ce n’est pas un hasard si le mot chien se dit en hébreu כלב, un mot qui fait allusion à l’essence même du chien : כל לב  entièrement tourné vers le cœur. Le chien n’est-il pas connu pour être le ‘’meilleur ami de l’homme’’ ? Il est probablement l’animal le plus populaire au monde parce que, lorsque son maître rentre à la maison, le chien affiche l’excitation de le voir rentrer. Le maître a le sentiment d’être vraiment le «cœur» de son chien. Il n’a pas encore été prouvé que les animaux soient capables d’éprouver de réelles émotions, mais tous les propriétaires de chiens en sont pourtant convaincus.

Nous devrions avoir l’humilité d’accepter que le chien a beaucoup à nous apprendre. Sourire et montrer une réelle excitation lorsque nous rencontrons quelqu’un et le saluons est la meilleure façon de procurer du bien-être à l’autre, ainsi que le sentiment d’exister. C’est également un moyen efficace pour dissiper la haine gratuite, et unir les cœurs juifs. C’est alors seulement que nous mériterons de voir le Temple à nouveau reconstruit dans toute sa gloire.

 

—-Réduire les activités——-

À Jérusalem, il est possible de profiter du jour de ticha bé av, pour dormir au Kotel (Mur occidental) ou marcher sur les remparts larges de la Tour de David, le chemin menant au Kotel. Certaines personnes s’efforcent de se rendre au kéver Rachel. Le Prophète nous enseigne que Rachel continue à pleurer pour ses enfants en exil afin qu’ils reviennent en Israël. En effet, notre rédemption serait impossible sans les larmes précieuses de Rachel Iménou et ses prières. Il est bénéfique de prier pour la rédemption finale sur sa tombe en ce jour de deuil pour le peuple juif.

En dehors de Jérusalem, et surtout à l’extérieur d’Israël, il semblerait qu’il n’y a rien à faire le jour de ticha bé av. De toute façon, c’est logique, dans la mesure où ticha bé av est le seul jour du calendrier juif où nous ne sommes pas censés faire beaucoup de choses. Bien sûr, nous sommes tenus de nous asseoir sur le sol, de ne pas porter les chaussures que nous avons l’habitude de porter, et surtout de pleurer, le soir ainsi que le lendemain. Nous devons lire et enrichir nos connaissances concernant la destruction du Temple, et les tristes événements de l’histoire juive. Mais, il n’y  pratiquement rien d’autre à faire à part cela. Pour quelle raison ?

Courir d’un endroit à l’autre, faire sans cesse des choses différentes…, nous empêche de nous concentrer sur le sens et le but de notre vie. Certaines personnes rejettent la faute sur l’internet, grâce auquel on passe d’un fichier multimédia à l’autre en quelques fractions de secondes. La capacité d’attention limitée de notre génération se reflète dans la longueur moyenne des articles de journaux et de magazine. Il y a dix ans, un article moyen comportait environ 2000 mots. Il y a cinq ans, il n’en comportait plus que 1000. Aujourd’hui, un article moyen est composé de 650 mots. À ce rythme, nos petits-enfants ne seront pas capables de lire plus de 50 mots sauf s’il y a une grande image ! Un de mes professeurs a dit avec ironie : si vous voulez détruire l’Amérique en un seul jour,  désactivez tous les appareils électroniques. Le taux de suicide risque d’augmenter de 80 % parce que les gens seront obligés de réfléchir au but de la vie et à la raison pour laquelle ils ont été placés ici sur terre.

Nos Rabbanim nous enseignent qu’un deuil n’a pas de bouche : אבל אין לו פה. Cela signifie qu’une personne en deuil n’est pas capable d’exprimer verbalement ses sentiments. De nombreuses personnes qui vont consoler des endeuillés pendant la période des ‘shiva’ se demandent quels sont les mots justes et appropriés, qu’il faut exprimer aux parents du défunt.  En réalité, la meilleure chose à faire est de ne rien dire. On doit s’efforcer au mieux d’écouter ce que la personne en deuil est en mesure de dire. À part des paroles de consolation, on ne peut rien dire d’autre. La seule chose que l’on puisse faire est de rester assis près de la personne, et de montrer son soutien. Il en va de même pour le deuil du Temple. Nous sommes censés rester assis, nous n’avons rien à faire de spécial, à part donner libre cours à nos émotions.

Beaucoup d’entre nous ont justement du mal à accomplir cela. Je voudrais suggérer ici une technique, basée sur le simple principe que les émotions sont communicatives. Quand vous vous asseyez avec quelqu’un qui est triste, un sentiment de tristesse vous envahit aussi tout naturellement. Lorsque vous vous trouvez en présence de quelqu’un qui est gai, vous êtes enclin à rire avec lui. Les producteurs de cinéma qui sont intéressés à susciter l’émotion, prendront soin de faire  couler des larmes sur les joues des acteurs. Lorsqu’il s’agira d’un spectacle humoristique, ils feront en sorte de faire rire le public pour vous faire rire aussi. De la même manière, la fatigue semble également être communicative. Lorsque vous voyez quelqu’un bailler, qui est la manière dont le corps exprime la fatigue,  vous vous retrouvez vous aussi en train de bailler sans vous en apercevoir.

On pourrait tout aussi bien appliquer ce principe le jour de ticha bé av. En effet, celui qui a du mal à ressentir les émotions appropriées à cette journée de deuil ferait bien d’assister à un minyan, où les participants mettent tout leur cœur à la lecture des kinot et de la méguilat Eicha. Assister à un cours afin de savoir tout ce qui a accompagné la destruction du Temple, et tout ce qui a été détruit en détail, est également fortement recommandé. Si nous parvenons à donner au jour de ticha béav sa réelle dimension, il y a de fortes chances que notre perspective sur le reste du calendrier juif s’améliore également.

 

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